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My Texas

Journaliste française au Texas depuis septembre 2011, je partage ici mes réflexions sur ce grand Etat, ainsi que mes revues de presse et de web via mes comptes Facebook et Twitter – Cécile Fandos

Neuf centres IVG fermés depuis vendredi au Texas

Neuf centres IVG fermés depuis vendredi au Texas

Ces derniers temps, ça bouge tous les jours sur l'avortement au Texas. Et depuis mon dernier post sur le sujet, je me suis contentée de relayer les derniers évènements par le biais de ma revue de presse quotidienne apparaissant ci-contre via Twitter, car les termes du débat opposant antis avortement et défenseurs du droit à l'IVG n'ont pas changé. Mais même s'il se poursuit en justice et devrait remonter jusqu'à la Cour Suprême, je pense utile de détailler ici les effets de la décision de la Cour d'appel des Etats-Unis pour le cinquième circuit de ne pas bloquer la dernière loi texane sur l'IVG en attendant d'examiner sa constitutionnalité, car cela n'a pas été fait dans les médias français.

Que s'est-il donc passé depuis vendredi ? Eh bien c'est relativement simple :

"Environ un tiers des centres IVG du Texas se voit interdit de procéder à cette intervention", résume l'agence AP, qui souligne que le Texas est "le quatrième et plus grand Etat" américain (après l'Utah, le Tennessee et le Kansas) à prendre une disposition comme celle obligeant ces centre IVG à fermer
(à savoir l’obligation pour les médecins pratiquant les IVG d'être autorisé à pratiquer dans un hôpital situé dans un rayon de trente miles autour du centre IVG qui pose problème à de nombreux avorteurs préférant pratiquer loin de chez eux, étant donné le peu de popularité de l'IVG hormis auprès des bénéficiaires...)
et que "dans des endroits comme la vallée du Rio Grande et l'Ouest du Texas, cette obligation met des centaines de miles entre de nombreuses femmes et les centres IVG".

Associated Press

Les articles parus depuis vendredi comprennent assez peu de témoignages. Mais une simple description de la salle d'attente du centre IVG d'Harlingen, dans la vallée du Rio Grande, permet à Associated Press de donner une idée de la façon dont la nouvelle est reçue chez les Texanes ayant besoin d'avorter.

"Dans une salle d'attente d'un centre IVG texan, une douzaine de femmes attendaient vendredi de voir le médecin, sachant déjà qu'elles ne pourraient mettre fin à leurs grossesses là. (...) Si les patientes n'avaient pas déjà connaissance du jugement avant leur arrivée à Reproductive Services of Harlingen, l'administratrice du centre, Angie Tristan, leur apprenait. (Et) en dépit des explications de Tristan sur le fait qu'elle ne pourraient pas bénéficier d'une IVG le lendemain, certaines femmes ont décidé de rester dans le faible espoir que quelque chose pourrait changer."

Associated Press

Et AP de citer ensuite le médecin du centre expliquant que certaines femmes pourraient aller jusqu'au suicide, puis l'exemple d'une femme de 39 ans déjà mère de plusieurs enfants et ne pouvant se permettre d'en mettre au monde un supplémentaire ni de se rendre dans un autre centre IVG, plus éloigné.

"C'est tellement injuste. C'est de la politique. (...) C'est ma décision et celle de personne d'autre."

Associated Press

C'est le Texas Tribune qui a dressé la liste complète des centre IVG ne pouvant plus opérer :

"Planned Parenthood n'offre plus d'IVG dans quatre de ces antennes au Texas : Fort Worth (près de Dallas), Austin, Waco (à mi-chemin entre Austin et Dallas-Fort Worth) et Lubbock", dans le Nord du Texas.
"Whole Woman’s Health cesse ce service dans trois de ses cinq antennes -à Fort Worth, San Antonio et McAllen", dans la vallée du Rio Grande.
"Un service limité sera néanmoins toujours possible à San Antonio, puisque qu'un médecin pouvant exercer dans l'un des hôpitaux proche du centre viendra effectuer des IVG une fois par mois", est-il précisé sans révéler d'où vient ce médecin.
"Le seul autre fournisseur d'IVG dans la vallée du Rio Grande, Reproductive Services, à Harlingen, met aussi fin au service d'IVG, car son médecin n'a pas accès aux hôpitaux du secteur."
"Cela signifie que le centre IVG le plus proche de la vallée du Rio Grande se trouve maintenant à Corpus Christi, à plus de cent miles de McAllen et Harlingen", souligne le Texas Tribune.
"A El Paso (dans l'Ouest de l'Etat), un autre centre Reproductive Services non-lié à celui d'Harlingen a également cessé d'assurer des IVG."
Bilan : "il y a des pans entiers de l'Ouest et du Nord du Texas dépourvus de centre IVG".

Texas Tribune

Le Texas Tribune fournit aussi le témoignage original de la travailleuse indépendante Marni Evans et de son compagnon. Respectivement âgés de 37 et 43 ans, ils veulent devenir parents un jour mais ne se sentent pas capable d'assumer cette responsabilité aujourd'hui, en particulier financièrement. Ils ont été choqués que l'IVG de Marni, programmée pour vendredi, ait été annulée douze heures à peine avant l'heure prévue. Pour eux, les lois sur l'avortement, c'était abstrait, c'était une façon pour les hommes politiques de se faire de la pub. Leur mésaventure les a rappelés à la réalité et ils prédisent une réaction de l'électorat.

En attendant une possible sanction dans les urnes, les défenseurs du droit à l'avortement ont saisi aujourd'hui le juge de la Cour suprême des Etats-Unis chargé du cinquième circuit, où se trouve le Texas. L'Etat a jusqu'au 12 novembre pour répondre à son injonction.

En attendant la suite du feuilleton, j'ai trouvé intéressant que ni l'Austin American Statesman, ni le Houston Chronicle, quotidiens de référence dans leurs villes respectives, ne publient de reportages sur l'impact de la décision sur les centres IVG de leurs localités respectives vendredi alors que ceux de villes de taille équivalente l'ont fait. A défaut de pouvoir partager ces articles, je vous mets ceux du Fort Worth Star-Telegram et du San Antonio Express-News.

Petit update ce mardi 5 novembre pour signaler ce papier de l'El Paso Times incluant des témoignages des personnels médicaux des deux centres IVG d'El Paso, celui ayant dû fermer et celui ayant pu rester ouvert.

"J'ai peur que si les gens ne savent pas que nous sommes ouverts, les femmes aillent avorter (dans la dangereuse ville frontalière de) Juárez", déclare notamment une infirmière du second centre.

El Paso Times

Un dernier lien utile pour finir : la fiche sur l'avortement au Texas du Guttmacher Institue faisant référence en matière de contraception et d'IVG aux Etats-Unis, où l'on peut se remémorer qu'il y a encore quelques années, il y avait 67 centres IVG au Texas (contre 36 aujourd'hui)...

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F
Terrible! On n'imagine pas ce qui se passe actuellement dans certains Etats américains! Merci pour cet article!
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